Depuis l’annonce officielle du passage de témoin du projet OpenOffice.org de Oracle à la Fondation Apache (ASF), de nombreux commentaires fleurissent sur le net. Beaucoup spéculent, d’autres s’offusquent et peu s’enthousiasment.
Jim Jagielski (cf. photo), le Président de l’ASF livre ses premières impressions sur ce transfert au site NetworkWorld.com afin de rassurer la Communauté.
A ceux qui disent qu’Apache est surtout connu pour ses logiciels liés à internet et qu’une suite bureautique est complètement différent, il répond qu’il existe par exemple un projet similaire avec le PGI OFBiz. Jagielski confirme que l’ASF est bien l’endroit idéal pour le renforcement (et même la « reconstruction ») du projet et de sa Communauté OpenOffice.org autour de ses fondamentaux.
Jagielski affirme aussi avoir « déjà contacté la Fondation Document qui s’occupe de LibreOffice, avec l’espoir que nous puissions travailler ensemble au bénéfice de la communauté existante. Ainsi il s’agit de vraiment booster la Communauté au sens large: développeurs et utilisateurs ».
A la question de la relation tendue avec Oracle et notamment la décision de quitter le Commité exécutif Java en novembre 2010, il répond qu’il s’agissait de montrer que la Fondation était un acteur de poids. Il reconnaît qu’il ne peut y avoir accord sur tout mais que lorsqu’un consensus est trouvé, « Oracle considère l’ASF comme le meilleur exemple des communautés du libre ».
Sur le problème de la licence, Jagielski pense qu’« avoir le code source OpenOffice.org sous la licence Apache est tout à fait attrayant » et cela au moins pour Oracle et IBM. LibreOffice est quant à lui, distribué sous licence LGPL 3 et MPL, ce qui oblige les contributeurs à fournir le code de leur version dérivée. Il reconnaît que cela ne peut être quelque chose dont IBM serait intéressé de faire avec sa suite Lotus Symphony.
OpenOffice.org est pour le moment en phase dite « Incubation ». Pourquoi IBM est-il aussi intéressé ? Oracle ne va plus mettre de ressources humaines en avant. Selon la proposition envoyée à Apache, Oracle affirme que les développeurs seront fournis par IBM, les sociétés éditrices de distribution Linux et probablement de structures du secteur public.
« Il semble peu probable que les développeurs de chez Novell (et qui contribuent à LibreOffice) vont se joindre immédiatement. Donc la plupart du développement va provenir d’IBM » affirme Jagielski. Il précise aussi que « Oracle devrait faciliter le processus d’incubation puis, une fois enclenché, tirera sa révérence du projet. » L’inquiétude persiste néanmoins sur ce sujet. Car, même si IBM contribue, OpenOffice.org est une application énorme. D’autres projets transférés de sociétés privées ont ainsi échoué dans cette phase d’incubation. Ce qui conduit à craindre que OpenOffice.org peut également se retrouver dans la même situation.
Il est aussi important de noter que le projet OpenOffice.org n’est pas automatiquement accepté. Jagielski confirme qu’il sera soumis au vote, sans doute après quelques va-et-vient sur la proposition initiale de Oracle. En supposant que le vote passe, le code donné est importé sur les serveurs de l’ASF et commence le processus d’incubation : compilation du code, soumission aux tests de la Communauté, etc.
Jagielski mentionne qu’il est aussi conscient qu’« il y a eu un retard de correctifs et autres améliorations apportées au code et qui n’ont pas encore été fusionnés ». Si le projet est accepté, il dit que la prochaine étape est de passer en « développement bootstrap » avec cet esprit communautaire qui encourage toute personne à soumettre des rustines pour corriger ou améliorer le logiciel.
Enfin, il a été suggéré qu’une partie du code puisse être retiré de OpenOffice.org pour cause de licence. Selon Jagielski, le code appartenant à Oracle sera autorisé et remis à l’ASF, mais certaines parties peuvent avoir des dépendances externes et donc des licences incompatibles. Il s’attend à ce que tout cela soit traité lors de la phase d’incubation et suggère « que ce soit là une occasion où la Fondation Document et l’ASF pourraient travailler ensemble pour avoir un logiciel plus modulaire sous licence Apache 2.0 ». Un peu comme ce qui est fait avec le moteur web Apache dont s’inspire deux produits propriétaires : IBM Websphere et Oracle HTTP webserver.
Alors ? OpenOffice.org va t-il prospérer sous la bannière Apache ? Les pronostics sont ouverts.