Quel avenir pour OpenOffice.org avec Oracle ?

Si Oracle a su calmer les craintes des millions d’utilisateurs de OpenOffice.org en déclarant qu’il allait continuer à soutenir la suite bureautique et le libre en général. S’il a été également applaudi par les anti-Microsoft lorsqu’il a annoncé qu’il livrerait une version Web appelé Oracle Cloud Office. Tout cela a toutefois, soulevé un certain nombre de questions auquel ni Oracle, ni la communauté OpenOffice.org, n’a pu répondre.
A quoi va ressembler Oracle Cloud Office ?
Il existe de nombreuses pistes que Oracle peut prendre pour créer Cloud Office. La suite bureautique pourra être une application Web collaborative comme Google Docs et s’appuyer sur la compatibilité de OpenOffice.org avec Microsoft Office et plus tard Microsoft Office Web Applications. Elle pourrait être aussi une suite plus modulaire à la façon Zoho et ainsi contrer la lourdeur de OpenOffice.org plus monolithique dans ses fonctionnalités.
Edward Screven (architecte logiciel en chef chez Oracle) n’a rien dit lors de son discours de la semaine dernière. Mais Raju Vegesna, « évangéliste » chez Zoho, fait valoir qu’il y a besoin de guider la stratégie d’Oracle. Il cite en exemple sa suite Zoho : « pour porter l’ensemble des fonctionnalités et malgré 350 développeurs, on a passé cinq ans à réécrire les composants pour une application Web. Les gens (sous-entendu Oracle) sous-estiment les efforts nécessaires. »
En comparaison, Sun avait (seulement) mis un effectif de 50 développeurs sur OpenOffice.org. Et OpenOffice.org est réputée pour sa complexité au niveau du code écrit principalement en C++ et Java. Les modules de code sont tentaculaires et l’association Ohloh (ex-SourceForge) estime qu’il faudrait 411 millions de dollars et 7.473 années-homme pour tout réécrire en repartant de zéro.
L’ennui, avec une offre trop allégée, déclare Guy Creese, analyste au Burton Group, est que cela limitera son attractivité pour les entreprises clientes. Celles que justement Oracle souhaite conquérir.
Et qu’advient-il de StarOffice ?
StarOffice était l’application originale dont Sun a libéré le code après l’avoir acheté en 2000. Presque identique à OpenOffice.org, la principale différence étant son prix puisque StarOffice permet d’avoir du support pour ses utilisateurs. Mais mal commercialisé, la gratuité a rendu OpenOffice.org beaucoup plus populaire et gommé l’image de StarOffice aujourd’hui.
Si elle apparait encore sur le site Web, le nom de StarOffice sera progressivement gommé par Oracle. Edward Screven n’a d’ailleurs jamais mentionné le nom de StarOffice la semaine dernière. Tout cela laisse à penser que Oracle va renommer StarOffice en OpenOffice.org et que la version gratuite prenne un nom du type « OpenOffice.org Community Edition ».
Quel avenir pour OpenOffice.org ?
À court terme, rien ne change. La branche 3.0 a été publiée en octobre 2008 et les téléchargements des versions successives ont dépassé les 100 millions. La version 3.2 va sortir et le calendrier de publication est calibré jusqu’en mars 2011 avec la 3.4.1.
Sur le long terme, Oracle semble vouloir maintenir la même mainmise sur le développement que celle qui était reproché à Sun et qui lui valait de fortes critiques de la communauté du libre. Ainsi, aucune création de fondation (comme pour Mozilla) n’est prévue malgré des demandes répétées. Des problèmes de licence et cette étanchéité a provoqué des « forks », des scissions dans le projet. Novell et IBM ont ainsi développé leur propre version avec Go-OO et Lotus Symphony.
Comment faire de OpenOffice.org une solution d’entreprise ?
OpenOffice.org a eu jusqu’à présent une adoption bipolaire : le grand public et les PME d’une part et le secteur public (collectivités et monde de l’enseignement) de l’autre. Oracle souhaite combler les vides. « Nous allons nous concentrer sur les grandes entreprises » affirme Edward Screven.
Une stratégie déjà mis en oeuvre par IBM (Lotus Symphony et Lotus Notes) et Microsoft (avec Office et SharePoint). « Oracle ne fait que suivre le mouvement » analyse Guy Creese. On peut donc penser que Oracle veuille se distinguer en faisant que OpenOffice.org soit apte à être « webisée » et être basée sur la collaboration
Alors, un OpenOffice.org à la mode « web » est-il irréalisable ?
Pas nécessairement, à en juger par le fait que trois entreprises en dehors de Sun l’ont déjà tenté ou réalisé.
Une petite start-up du Nevada appelée ZoooS LLC qui a montré en avant-première une version web hébergée de OpenOffice.org il y a an et demi. Une version partiellement fonctionnelle mais qui a apparemment été abandonnée par ses créateurs depuis. Une extension de Firefox (mais compatible uniquement avec la version 2.x), est toujours disponible en téléchargement.
Un groupe peu connu nommé OpenOffice.org Anywhere a récemment mis en ligne une version de OpenOffice.org dans un navigateur, pour laquelle il facture 0,65 $ de l’heure.
Enfin, cocorico pour la société française Ulteo (projet initié par Gaël Duval, fondateur de Linux Mandriva) qui utilise une appliquette Java pour émuler OpenOffice.org à travers internet. Elle a attiré 95.000 utilisateurs qui bénéficient d’excellentes performances avec une version bureau en mode hébergé de OpenOffice.org. Son PDG Thierry Koehrlen précise cependant que Ulteo n’a jamais été approché par Sun pour aider à développer une version Web.

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